Je suis venu pour la première fois au Fresnoy pour écouter Jean-Marie Straub, il y a quelques années. J’ai été très surpris par ce lieu. J’étais intrigué par l’idée de n’étudier que deux années pour réaliser deux projets. J’ai toujours réussi à faire des films en mêlant théorie du cinéma et pratique de la photographie. Cette année je me suis lancé dans une expérience cinématographique. Je ne dirais pas qu’il s’agit d’un film mais plutôt d’une expérience d’une durée fixe avec une narration, des images et du son. Il s’agit pour moi d’une étude ethnographique qui s’est faite au Ghana autour d’une pratique mystérieuse qui s’appelle «sakawa». C’est une pratique très contemporaine qui consiste à utiliser des pouvoirs vaudous pour monter des escroqueries sur internet. Je voulais parler des obsessions que peuvent créer les nouvelles technologies tout en les utilisant moi-même dans l’élaboration du film. Habituellement je suis seul sur mes films, il n’y a que moi avec une caméra et un micro. Cette fois j’ai travaillé avec un ingénieur du son afin d’améliorer la technique de réalisation. Je ne pars jamais d’un scénario, mes films s’écrivent pendant le montage. La forme du film se décide également pendant le montage. Lorsque je présente un film au public cela me pose problème car il m’est toujours difficile d’expliquer les choses. Je préfère que chacun ait la possibilité de le comprendre selon sa propre interprétation. Je suis contre l’idée qui consiste à croire que certaines personnes ne peuvent pas regarder des films car ils sont jugés trop difficiles. Personnellement je ne veux pas changer ma pratique pour essayer de faire quelque chose de plus ouvert car je pense que tout le monde peut voir un même film. Nous sommes tous égaux pour ce qui est de la pensée.